Comment désamorcer les disputes stériles !
Dernière mise à jour : 11 mai 2021
Les disputes suivent un schéma tristement bien connu : le mot de trop, « la phrase qui tue » et c’est l’escalade ! Nous aimerions alors tellement faire machine arrière… Nous allons voir comment désamorcer et sortir du cercle vicieux des disputes par un outil simple : les 4 positions de la communication.
Le stimulus : détonateur de dispute

Nous connaissons toutes et tous ce moment de bascule, cette phrase de trop parfois échappée sous la colère "Tu es bien comme ton père !", "Tu sais toujours tout mieux que les autres !", "De toute façon tu ne changeras jamais", qui déclenche l'escalade de la dispute. Les silences lourds également qui nourrissent nos pensées noires et schémas intérieurs en quelques secondes. Nous sommes alors comme coupé.e de l'autre.
Ces moments constituent un stimulus, une sorte de détonateur sur lequel on semble appuyer encore et encore. Ce schéma n'est pourtant pas une fatalité ! Il existe selon la CNV, quatre grandes positions dans la communication :
Les positions de la dispute "classique" : Le « chacal vers soi » et le « chacal vers l’autre ».
Le « chacal vers soi » et le « chacal vers l’autre » sont les positions privilégiées des disputes mais aussi des conflits "froids" et non-dits des personnes qui évitent justement les conflits.
Pourquoi utilise-t-on la symbolique du Chacal ? Parce que le chacal, pour exprimer son besoin de tendresse, très maladroitement, mord son partenaire…
Plutôt que de créer du lien vivant par la communication, le langage vient alors attiser, ou rigidifier la relation à l'autre et à nous même et ferme la possibilité d'évoluer.
Nous faisons toutes et tous du chacal sans même souvent nous en rendre compte envers nous même et les autres. Quelques indices pour le repérer:
les "il faut", "on doit" rigides
les interprétations du comportement de l'autre sous nos propres filtres érigés en certitudes: "Il a rien dit DONC il pense ceci ou cela, ou DONC il ne m'aime pas etc"
les généralisations « Tu es TOUJOURS en retard », « Je ne suis JAMAIS prise au sérieux » , la binarité tout noir/tout blanc
les comparaisons et dépréciations « Je suis nulle ! C'est Inutile ! Il ne vaut rien ! »
les « Tu qui TUES » : TU me fais cela, TU me fais sentir comme ceci, TU es responsable … et l’on en oublie parfois aussi notre part de responsabilité.
Dans toute relation il y a co-responsabilité, chacun tient un bout de la relation…
Même si une part de nous sait qu'utiliser ces mots créé de la souffrance pour nous même et les autres, une autre part de nous y trouve pourtant quelque chose de fort tentant qui nous appelle parfois viscéralement. En effet le Chacal à travers les mots durs, parfois les insultes ou les cris nourrit d’une certaine manière nos besoins de défoulement ou d'attention parfois si puissants. Néanmoins, une fois ces besoins plus ou moins nourris, nos besoins fondamentaux de reconnaissance, d'expression authentique, de considération, d'écoute, d'accueil ... qui étaient cachés derrière, restent quant à eux affamés…
La dispute boucle donc son cercle vicieux, sans que ni l’un ni l’autre ne parvienne à sortir de ce cycle . Nous nous figeons sur nos positions avec la sensation que plus rien ne nous relie ou qu'il n'y a plus d'issue.
Pourtant nous partageons dans cette dispute l’un des besoins les plus précieux ressentis par tous les êtres humains : le besoin fondamental d’empathie.
C'est à dire la reconnaissance et la compréhension de nos émotions par un autre individu et aussi par nous même.
Les positions d’apaisement : « l’empathie vers soi » et « l’empathie vers l’autre »
Il existe dans le modèle de la Communication Non Violente, deux autres positions essentielles qui nous permettent de sortir du mode chacal : l’empathie vers soi et l‘empathie vers l’autre (ou si vous préférez garder l’image des animaux, « les positions girafe » dont le long cou et le gros cœur permettent de prendre de la distance avec la situation ).

L’empathie vers soi :
Il s’agit d’aller apporter de l’écoute et de la clarté en soi-même en contactant nos émotions.
En effet nos émotions sont là pour nous signifier si nos besoins sont nourris ou non et nous amener à l'action pour y subvenir.
De la joie, de la légèreté, de l'enthousiasme et toute la gamme de la sérénité à ébullition joyeuse sont le signe d'un besoin nourri.
La peur, la colère, la tristesse, le dégout et autres nous alertent sur le fait que nos besoins ne sont pas nourris et qu'il est important d'y remédier.
Un besoin c'est quoi exactement?
Les besoins sont universels et partagées par tous les humains: besoin de sécurité, de reconnaissance, de partage, de découverte, de connexion... (cf liste des besoin ci dessous)
Chacun les vit, selon le moment, de manière plus ou moins intense:
Les besoins sont universels et communs à tous les humains quelque soit la culture et le milieu social.
Ce qui diffère entre les humains c'est parfois la manière dont ils nourrissent leurs besoins selon la culture sociale, familiale, le contexte, le vécu personnel...
Il y a autant de manière de nourrir un besoin que d'être humain.
Par exemple, je peux nourrir mes besoins de "défoulement" et de "connexion aux autres" en supportant au stade mon équipe de foot, ou en chantant dans une chorale, ou en dansant la salsa ou toute autre stratégie en ce sens.
Les activités sont différentes, rien ne semble relier en surface la choriste et le supporter de foot et pourtant leurs besoins profonds les relient.
L’empathie vers soi :
Comprendre les besoins sous-jacents derrière ce que nous faisons ou souhaitons faire, est une clé formidable pour mieux se comprendre soi-même et les autres.
On peut ainsi résumer la manière d'aller chercher le besoin enfoui derrière des mots "chacal:
Exemple d'un début de dispute chacal
"Tu es tout le temps en retard et tu ne fais jamais d'effort tu n'en a rien à faire de moi!! "
1) Observation objective des faits (qui, quoi, comment, où? Qu'est ce qui a été dit/entendu)
Chacal => "Tu es tout le temps en retard et ne fais jamais d'effort"
Empathie-Observation objective => "On avait convenu de se retrouver à 20h30 et tu arrives avec 1h de retard sans avoir prévenu"
2) Quelles sont les émotions présentes en vous ?
Chacal => "Tu n'en a rien à faire de moi!!"
Empathie-contacter les émotions =>Je me sens « émotion** : triste / en colère/ j’ai peur / je suis surpris/ je suis fatigué… »
3) Chercher le besoin caché derrière:
Les besoins sont rarement exprimés dans le mode chacal, ils sont passés sous silence et c'est ce qui est particulièrement souffrant et qui nous donne la sensation de ne pas être vu.e, entendu.e par l'autre.
« Car à cet instant j’aimerais tellement/ je voudrais tant/ j’ai besoin de : partage avec toi/ de clarté sur ce qui se passe en toi / de douceur /d'attention »
**Attention aux jugements du chacal déguisé : dire je me sens « manipulé, agressé, rejeté » sous entend que l’autre est responsable d'emblée de la situation. Si globalement le mot peut être suivi de « par toi » il s’agit probablement d’un jugement subjectif.
Restez simple pour commencer et référez vous aux émotions de bases peur/colère/tristesse/joie
L’empathie vers l’autre
L’empathie vers notre partenaire consiste à faire un pas, au-delà de la surface pour comprendre ce qui se joue en la personne et retrouver le duo sentiment/besoin qui se cache derrière les mots durs ou les cris.
Cela peut tout simplement être une question ouverte
« Comment tu te sens au fond quand tu dis (phrase stimulus: "T'es nulle"etc) ? »
Ou bien formuler suivant l’ approche ci-dessus à savoir :
1) Quand tu dis ...: rappel objectif des faits
2) En fait tu te sens ...en colère, triste, tu as peur…?
3) Car tu as tellement au fond besoin à cet instant de... sécurité/ de reconnaissance etc… ?
Est-ce que c’est ça ?
Nous faisons chacun.e de notre mieux : soutien mutuel et douceur
Cette démarche peut apporter beaucoup de changement et sortir du cycle infernal chacal, si les deux partenaires s’engagent à se soutenir mutuellement .
Attention au piège ! Cette approche ne doit pas être retournée vers l’autre par une phrase telle que « Ah ben voilà, TU fais encore du chacal !!! ».

Avancer sur cette transformation de la communication, c’est sortir du face à face stérile et co-construire ensemble au service de la relation.
Je ne suis pas Maitre Zen, et vous non plus. Il ne s’agit nullement de nous imposer de devoir toujours tout accueillir à bras ouvert et avec le sourire, s'écraser ou jouer des faux-semblants. Au contraire, l'intention passe au préalable par la reconnexion authentique à soi, à nos besoins et à notre envie de vivre la relation à l'autre. Quels sont mes besoins ? Mes limites ? et la possibilité de les exprimer tout en respectant le vécu de l'autre.
Nous pouvons ainsi mettre de la conscience sur nos mots et nos comportements en commençant par le plus important : OBSERVER SANS JUGEMENT CE QUI SE PASSE EN NOUS MÊME Y COMPRIS NOS AMBIVALENCES. Nous sommes rarement monobloc et fait d'une seule émotion. Observer la position dans laquelle nous nous trouvons : Chacal vers soi ? Chacal vers l’autre ? Et nous donner un peu plus de douceur à nous-même.
Une fois repéré le chacal, tel que listé au début du texte, nous pouvons ensuite consciemment faire le choix de nous installer dans l’empathie vers nous-même, et si notre jauge d’empathie est suffisamment haute, vers l’autre.
Sources: Marshall Rosenberg "Les mots sont des fenêtres ou des murs"
